- Acteur majeur de la biodiversité en France, l’OFB accompagne l’Etat pour relever le défi de la protection et la restauration de la biodiversité en métropole et dans les Outre-mer. A travers la convention signée ce jour, les partenaires se fixent des objectifs partagés, prévoient des actions concrètes et définissent une méthode de travail, notamment :
- Renforcer le pilotage stratégique de la police de l’environnement au regard des enjeux et des stratégies nationales et en lien avec l’autorité judiciaire ;
- Promouvoir la communication autour de la police de l’environnement auprès des différents acteurs des territoires de manière à en renforcer la compréhension ;
- Faire bénéficier le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer et les administrations déconcentrées de l’appui du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et de l’OFB pour les politiques publiques concernant l’eau, la biodiversité et l’environnement marin, notamment au sein des missions interservices de l’eau et de la nature et des comités opérationnels de lutte contre la délinquance environnementale ;
- Accompagner le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer dans son engagement pour la transition écologique et renforcer son investissement en la matière ;
- Contribuer à la montée en compétence des hauts fonctionnaires et des personnels des deux parties, en matière de biodiversité ;
- Fluidifier les échanges sur le permis de chasser ;
- Poursuivre le travail engagé sur les plans nationaux d’action concernant les grands prédateurs terrestres (loup, lynx, ours).
- La convention détaille des modalités de travail spécifiques à l’échelle nationale ainsi que dans les territoires. En matière de police de l’environnement, il prévoit par exemple une implication personnelle du préfet de département dans l’animation de la stratégie de contrôle, capitalisant ainsi sur l’expérience des 10 000 contrôles sécheresse réalisés cet été.
Lundi 9 janvier 2023, Madame Bérangère Couillard, secrétaire d’Etat chargée de l’écologie, a annoncé les mesures gouvernementales visant à lutter contre les accidents de chasse. L’objectif annoncé est « de tendre vers zéro accident » et d’assurer « une sécurité renforcée sept jours par semaine ».
Pour ce faire, il est prévu :
- La création d’une contravention pour sanctionner l’acte de chasse sous l’emprise excessive de l’alcool avant de déposer un projet de loi visant à créer un délit ;
- Les sanctions en cas d’accident grave devraient également être renforcées, avec notamment la possibilité d’un retrait du permis de chasse pour une certaine durée avec interdiction de le repasser ;
- Généraliser une formation à la manipulation pratique des armes pour l’ensemble des chasseurs d’ici à 2029 ;
- Les organisateurs de chasses collectives devront recevoir une formation spécifique par les fédérations et devront déclarer leur battue. A cet effet, une plateforme numérique sera mise en place à l’automne pour identifier les zones et les horaires non chassés.
- Par ailleurs, le Gouvernement a écarté l’instauration d’une journée sans chasse, qui devait être le dimanche, pour le plus grand soulagement des chasseurs.
A cet effet, il apparaît intéressant de revenir sur les principales mesures de ce plan :
- L’objectif « Zéro accident» :
- Il y aurait en France plus d’un 1millions de chasseurs dit actif (c’est-à-dire validant leur permis chaque année) et donc des centaines de millions de balles et cartouches tirées chaque année.
- Malgré cela, l’Office Français de la biodiversité n’a dénombré que 80 accidents dont 8 mortels pour la saison 2021-2022, ce qui démontre que malgré la manipulation d’armes létales, les chasseurs sont, dans leur immense majorité, des personnes responsables.
- Si la volonté de réduire le nombre d’accidents est parfaitement légitime, il apparaît tout de même particulièrement démesuré de prétendre vouloir supprimer tout risque d’accident inhérent à toute activité humaine quelle qu’elle soit.
- L’interdiction de la chasse en état d’ébriété :
- La mesure phare annoncée par le Gouvernement pour réduire les accidents de chasse serait la création d’une contravention par décret, puis d’un délit par la loi, pour sanctionner la chasse sous l’emprise d’un état alcoolique. Or, cette annonce n’est qu’une mesure de communication. - D’une part, il est rappelé que dans 91 % ou 93 % des cas, les chasseurs, impliqués dans un accident, sont à jeun (Rapport du Sénat en date du 14 septembre 2022 sur la sécurisation de la chasse, Proposition n° 12).
- En outre, dans les 7 % ou 9% des accidents où les chasseurs ont consommé de l’alcool, aucun chiffre et aucune donnée ne permet de souligner que ces derniers auraient un taux d’alcool supérieur à 0,5 g/l. Ni le Gouvernement, ni le rapport du Sénat du 14 septembre 2022 n’apportent d’éléments renseignant le taux moyen d’alcoolémie des 7 % ou 9% de chasseurs personnes impliquées dans un accident Ainsi, cette mesure n’aura aucun effet notable sur le nombre d’accidents.
- D’autre part, la volonté affichée d’instaurer un délit et non pas d’en rester à la contravention, laisse perplexe. En effet, cette étonnante sévérité ne recoupe pas la réalité du terrain qui démontre que, bien au contraire, les chasseurs pratiquent leur passion à jeun. A cet effet, les délits dépendent du Tribunal correctionnel.
- Pour ce qui concerne l’alcool au volant, seul un taux d’alcool égal ou supérieur à 0,8 g/l de sang est un délit et l’auteur risque une amende pouvant aller jusqu’à 4 500 € et une peine d’emprisonnement de 2 ans maximum. Des peines complémentaires telles que la suspension ou le retrait de permis ainsi que la confiscation du véhicule sont notamment prévues. Il est également à souligner que la constitution du « délit d’alcoolémie à la chasse » ne serait pas conditionnée par la survenance d’un tir dangereux mais par le seul constat d’un taux d’alcool supérieur à 0,5 g/l, par les forces de l’ordre ou les agents de l’OFB, durant un acte de chasse.
- Autrement posé, et si le taux de 0,5g/l est retenu (taux applicable à la conduite d’un véhicule), le simple fait de tenir un fusil, même non chargé, après avoir consommé deux verres pourra conduire le chasseur à passer devant le Tribunal correctionnel. Or, nous pensons que la création d’une infraction ne doit avoir pour objectif que de garantir efficacement la sécurité d’autrui, ce qui n’est aucunement démontré en l’espèce. En effet, l’écrasante majorité des chasses, et en particulier celles aux gros gibiers, ont lieu le matin et il est rare de petit-déjeuner avec une bouteille de vin…
- En outre, cette mesure aura pour conséquence de renforcer les déjeuners d’après chasse. Or, si actuellement les organisateurs de chasse ont l’obligation de contrôler et d’empêcher tout chasseur en état d’ivresse de prendre son fusil, il est probable que ces organisateurs seront moins enclins, dans la mesure où leur responsabilité ne sera plus recherchée, à assurer ce même devoir de police avec les personnes qui reprendront leur volant après le déjeuner de chasse.
- Il risque donc d’y avoir plus de procès que de vie véritablement sauvées à la chasse…
- S’agissant de la généralisation de la formation à la manipulation pratique des armes pour l’ensemble des chasseurs d’ici à 2029
- Cette mesure est surprenante dans la mesure où elle existe déjà.
- En effet, l’arrêté du 5 octobre 2020 relatif à la sécurité en matière d’activité cynégétique a justement créé une obligation de formation des détenteurs d’un permis de chasse en les soumettant à une obligation de remise à niveau décennale, portant sur les règles élémentaires de sécurité.
- Ainsi, il est surprenant que le Gouvernement annonce une mesure qu’il a déjà mise en place, il y a juste deux ans… Pour autant, c’est bien l’obligation de formation aux règles de sécurité que le Gouvernement aurait dû renforcer.
- En effet, il est constaté que l’instauration d’un examen au permis de chasse ne date que de 1976. Ainsi, les chasseurs nés avant 1960 peuvent disposer d’un permis de chasse sans jamais avoir été formés. Cette considération est d’autant plus importante que l’augmentation des populations de grands gibiers et la généralisation des battues à balles ne sont apparues qu’à partir des années 1990.
- En outre, l’instauration d’un examen pratique au permis de chasse n’est apparue qu’en 2003 et ce n’est qu’en 2014 qu’un examen éliminatoire à la manipulation d’une arme n’a été introduit. Autrement posé, un grand nombre de chasseurs (votre auteur compris) qui serait théoriquement susceptible de pouvoir être intéressé de suivre pendant une journée un stage de rappel des règles élémentaires de sécurité.
- Aussi, et si l’objectif du Gouvernement était justement de tendre vers la diminution drastique des comportements accidentogènes à la chasse, il serait bienvenu d’instaurer plutôt une obligation de stage de sensibilisation généralisée à la sécurité à effectuer dans un délai court de deux ans par exemple (et non pas de 10 ans comme c’est prévu). Or, la seule raison évoquée pour le refus de renforcer l’obligation de formation est l’absence de moyen (humain et financier) pour assurer ces stages de sécurité. Le pire étant que la grande majorité des chasseurs serait certainement favorable à cette mesure et qu’à ce jour seuls les volontaires pourront en profiter.
- Le renforcement des sanctions en cas d’accident grave avec notamment la possibilité d’un retrait du permis de chasse pour une certaine durée avec interdiction de le repasser :
- Cette mesure est également surprenante dans la mesure où elle existe déjà. En effet, l’article 223-18 du code pénal prévoit déjà, à titre de peine complémentaire, qu’en cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité (Article 223-1 du code pénal), l’auteur de l’infraction risque l’interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, de détenir ou de porter une arme.
- Il est également prévu, en cas de condamnation pour infraction à la police de la chasse ou de condamnation pour homicide involontaire ou pour coups et blessures involontaires survenus à l’occasion d’une action de chasse, un retrait définitif ou temporaire de 5 ans du permis de chasse (Article L.428-14 du code de l’environnement).
- La suspension du permis de chasse peut également être prononcée par l’autorité judiciaire pendant toute la durée de l’instance pour tout chasseur impliqué dans un accident de chasse grave (Article L.428-15 et suivants du code de l’environnement).
- Ainsi on ne comprend pas bien en quoi ces mesures présentées comme nouvelles, le sont en réalité
- L’obligation de formation des organisateurs de chasse collective, la déclaration de leurs battues et la création d’une plateforme numérique pour identifier les zones non chassées :
- L’obligation de formation des organisateurs de chasses collectives ne pose pas de problème particulier si tant est qu’ainsi que développé ci-avant elle aurait dû être généralisée. S’agissant de l’obligation de déclaration préalable des chasses collectives à tir au grand gibier, il peut être souligné que cette mesure est d’ores et déjà appliquée dans certaines forêts domaniales en Île-de-France où l’accès aux zones de chasse est interdit les quelques jours de l’année où, en semaine, des chasses à tir collectives au grand gibier ont lieu.
- C’est une mesure de sécurité au regard de la fréquentation importante de ces espaces. Les calendriers de chasse étant connus dès le début de la saison, leur mise en œuvre juridique ainsi que l’information des autres usagers peuvent s’effectuer aisément. Cette mesure est intéressante cependant qu’elle n’aurait d’intérêt que pour les territoires ouverts à la circulation du public (forêts domaniales ou communales).
- En effet, il paraît particulièrement surprenant de contraindre les gestionnaires des territoires privés à déclarer au public qu’il ne peut pas aller dans un endroit où il n’a finalement rien à y faire. En outre, il est probable que cette mesure soit une usine à gaz peu populaire dans la mesure où elle contraindra le promeneur à dorénavant s’obliger lui-même à vérifier les horaires et zones chassées avant de partir en promenade.
- L’hostilité à la chasse se trouvera d’autant plus renforcée. Pire, cette déclaration pourrait inciter les groupuscules militants anti-chasses à venir entraver une chasse en leur permettant de venir avant le début de la battue se disséminer sur le territoire de chasse. Enfin, il est souligné qu’en application de l’article L.424-15 du code de l’environnement et de l’arrêté du 5 octobre 2020 relatif à la sécurité en matière d’activité cynégétique, les chasseurs ont déjà l’obligation, en cas de chasse collective à tir au grand gibier, de disposer des panneaux le jour même de la chasse sur les routes et chemins publics aux abords de la zone de chasse pour avertir passants et automobilistes. Ces panneaux doivent être posés impérativement avant le début de l’action de chasse.
- En conséquence, les mesures gouvernementales n’apparaissent n’être qu’un coup d’épée dans l’eau et il est probable malheureusement qu’elles n’auront que peu d’effet notable sur les accidents de chasse. Seule une obligation généralisée et renforcée, à court terme et répétée, de sensibilisation à la sécurité à la chasse permettrait de faire de nouveaux progrès. Déjà, de nombreux interlocuteurs non chasseurs ont fait connaître leur hostilité au plan gouvernemental. Paradoxalement, le plan gouvernemental satisfait les chasseurs alors qu’il avait pour objectif de rassurer les non chasseurs. Les chasseurs apparaissent comme un groupe privilégié et choyé par le Gouvernement, ce qui est une très mauvaise nouvelle sur le long terme.
- Ainsi, l’affaire continue et bientôt ce Gouvernement, ou un prochain moins enclin à protéger les chasseurs, sera poussé dans ses retranchements, par la pression du public, à devoir produire des mesures encore plus contraignantes, voire populistes, telles que : la proposition d’interdire la chasse le weekend, le passage à 0 g/l d’alcool, la suppression de la chasse à proximité des zones urbanisées ou d’une voie ouverte à la circulation publique…
Aymard de la Ferté-Sénectère
Avocat associé
126, boulevard Haussmann
75008 Paris