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Opposition entre chasseurs
et SPA  à partir de 1909
 
Mercredi 29 décembre 2021
 

Opposition entre chasseurs
et société protectrice des animaux :

Tout a commencé en 1909 !

 

Source : chassons.com

Tout chasseur a déjà entendu parler de la duchesse d’Uzès. Une aristocrate au caractère bien trempée et aux ambitions immenses, qui vécut entre le 19e et le 20e siècle. Sur France Culture, l’anthropologue Charles Stépanoff raconte son histoire impressionnante, dans laquelle chasse et protection des animaux sont intimement liés.

 - Non seulement elle a été une personnalité emblématique de la chasse à courre, mais elle a aussi été la première femme à obtenir son permis de conduire… Et une amende pour excès de vitesse. Pendant plusieurs siècles, la chasse et la protection animale étaient deux sujets qui ne faisaient qu’un. La duchesse d’Uzès adhérait aux deux, bien qu’elle finisse par en connaître la rupture, en 1909, lorsque les sociétés défenseures des animaux décidèrent que la chasse et le bien être animal n’étaient plus compatibles.

Une envie de tout tester

 - Cette noble assoiffée de découvertes et d’aventure descendait d’une autre femme de renom, la Veuve Clicquot, première femme à diriger une maison de Champagne. Notons qu’elle sera aussi la première lieutenant de louveterie, une brigade à l’époque chargée de traquer le loup, mais c’est aussi la première femme maîtresse d’équipage de chasse à courre. Cette chasse noble pour laquelle elle se passionnera était la seule chasse à cette époque à inclure un peu les femmes, qui dans d’autres contextes étaient cantonnées à des activités moins « violentes ».
 - Non contente de se satisfaire d’une activité dans laquelle elle excelle, la duchesse est aussi sculptrice et écrivaine à ses heures perdues, sous le nom de Manuela. C’est en bref une mondaine en quête d’aventure, à la ville comme au bois. « Son engagement dans la chasse à courre, c’était aussi un engagement féministe. Il s’agissait de montrer qu’une femme était capable de mener un équipage, d’avoir des hommes à son service, qu’elle dirigeait un peu comme une armée, et que les femmes pouvaient avoir accès à des activités masculines », explique Charles Stépanoff

Une pionnière dans de nombreux domaines

 - C’est d’ailleurs la première femme, en 1898, à obtenir le permis de conduire. Quelques mois plus tard seulement, elle écopera d’une amende de cinq francs pour excès de vitesse, contrôlée à 15 km/h au lieu des 12 km/h préconisés en ville. Plus tard, elle créera l’Automobile club féminin, pour la simple et bonne raison que son homologue masculin lui avait refusé l’entrée. Un caractère bien trempé et une intrépidité sans faille, qui finira par lui jouer des tours. Une polémique anime les journaux de l’époque, celle des « larmes du cerf », qui coulent des yeux du cervidé mis à mort.
 - À partir de ce moment, deux camps s’affrontent. Certains pensent qu’il s’agit d’une émotion, d’autres d’un phénomène tout à fait physiologique, s’agissant de la sueur de l’animal. La duchesse d’Uzès est catégorique : il ne s’agit que de sueur. Pour elle, la vénerie est un « merveilleux et passionnant spectacle », et pas un « sport sanguinaire ». Cette prise de position lui vaut l’exclusion de la Société protectrice des animaux, à laquelle elle adhérait depuis de nombreuses années. Elle prend les devants et la quitte dès 1909.

L’évènement clé de la fracture entre chasse et protection animal

 - À la suite de sa démission, de nombreuses autres personnalités lui emboîtent le pas par solidarité. À partir de ce moment, deux camps autrefois amis se battent pour des idéologies qui sont devenues différentes : les chasseurs d’un côté et les défenseurs de la cause animale de l’autre. Aujourd’hui, nous sommes les héritiers directs de ce clivage. Pourtant, à l’époque, la SPA accueillait des veneurs et la Ligue de protection des oiseaux, aujourd’hui anti-chasse, a été créée à l’initiative de chasseurs au gibier d’eau.
 - « Le conflit, c’est un rapport au monde, c’est : qu’est-ce que l’Homme a comme place dans la nature ? », pose Charles Stépanoff. D’un côté, les animalistes insistent sur la sensibilité des animaux, tandis que les chasseurs sont héritiers d’une vision qui est fondée sur un affrontement symétrique entre l’intelligence animale et l’intelligence humaine. D’après l’anthropologue, on peut même distinguer trois écoles différentes aujourd’hui : la chasse paysanne, qui consiste à se nourrir soi-même, la chasse bourgeoise qui prône le principe de propriété privée et une idée qui nous vient de la Renaissance selon laquelle la nature est un décor dans lequel l’Homme n’a pas à intervenir.
 - Depuis les années 1970, c’est ce dernier modèle qui devient dominant dans nos sociétés. De quoi faire se retourner dans sa tombe la duchesse d’Uzès, qui s’éteint en 1933 au château de Dampierre, dans les Yvelines. Aujourd’hui, ce domaine est toujours très réputé pour la chasse à courre.

Publié par : chassons.com

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