ALERTE PESTE PORCINE
Samedi 11 Janvier 2020 Peste porcine africaine :
le Canada tente de mettre au point un vaccin La peste porcine africaine, qui est sans risque pour la santé humaine, tue la presque totalité des cochons qui en sont atteints. Photo Olivier Pondbriand, archives lapresse.ca Dans un geste rarissime, Ottawa vient de permettre à un laboratoire ultrasécurisé de la Saskatchewan d’importer le virus de la peste porcine africaine sur le sol canadien dans l’espoir de mettre au point un vaccin pour enrayer la maladie qui décime les cheptels à travers le monde. Différents médicaments antiviraux seront aussi testés. - « Le virus est en route », a expliqué, en entrevue avec La Presse, le Dr Volker Gerdts, directeur du Vaccine and Infectious Disease Organization – International Vaccine Centre (VIDO-InterVac). Ce centre de renommée internationale affilié à l’Université de la Saskatchewan a un parcours impressionnant, ayant mis au point 10 vaccins depuis sa création en 1975.
- En règle générale, seuls les laboratoires étatiques peuvent posséder des agents pathogènes aussi virulents au sein de leurs installations. D’ailleurs, seule une poignée de centres de recherche dans le monde travaillent actuellement avec le virus de la peste porcine africaine puisque, pour cela, une certification de biosécurité de haut niveau est nécessaire.
- C’est un laboratoire allemand qui fournira le virus aux chercheurs canadiens. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) a donné le feu vert en décembre, mais vient tout juste de rendre l’information publique. - "Considérant l’ampleur et l’impact de la maladie, on veut encourager l’innovation et la recherche pour trouver un vaccin qui va marcher." Le Dr Jaspinder Komal, vétérinaire en chef du Canada
- - La peste porcine africaine, qui est sans risque pour la santé humaine, tue la presque totalité des cochons qui en sont atteints. Pour l’instant, la maladie n’est pas présente au Canada, mais elle progresse à un rythme exponentiel en Asie après avoir atteint l’Europe de l’Est en 2007. Elle est présente en Afrique depuis près de 100 ans.
De nombreux modèles de vaccins
- Voyant la maladie s’étendre, le centre VIDO-InterVac se penche sur la question depuis déjà cinq ans. Plus de 30 modèles de potentiels vaccins ont été créés.
« On ne commence pas de zéro, explique le Dr Gerdts. La majorité de notre travail va consister à prendre ce que nous avons déjà bâti et à l’améliorer en utilisant par exemple des adjuvants ou en l’optimisant à l’aide de nouveaux gènes. »
- Selon les plus récentes statistiques de l’Organisation mondiale de la santé animale, on compte actuellement 12 219 foyers d’éclosion répartis dans 50 pays. Cet organisme intergouvernemental, qui coordonne la lutte mondiale contre les maladies animales, estime que le quart du cheptel planétaire sera tué par le virus.
La peste porcine africaine est causée par un virus à ADN de genre Asfivirus. - "Une partie de notre travail visera à comprendre les mécanismes de la maladie. C’est l’un des virus les plus complexes qui existent. Il compte plus de 150 gènes et, pour la moitié d’entre eux, on ignore leur fonction. On ne sait même pas si l’on devrait les inclure dans le vaccin. " Le Dr Volker Gerdts
- Les prototypes de vaccins mis au point seront faits à l’aide de vecteurs d’adénovirus, composés seulement de certains gènes d’un virus. Ce type de vaccin diffère de ceux faits à partir du virus complet et vivant. Il serait impensable, au Canada, d’utiliser ce type de vaccin, car la maladie n’y est pas présente et pourrait se propager à des porcs en bonne santé.
- Par ailleurs, divers partenaires du centre VIDO-InterVac ont déjà manifesté leur désir de faire tester différentes molécules antivirales qui pourraient servir de remède pour les animaux déjà infectés.
Trousse de détection testée au Viêtnam
- En 2020, le virus sera seulement utilisé sur des cultures cellulaires. Il ne pourra pas encore être utilisé pour inoculer la maladie à des porcs en vue de déterminer s’il fonctionne.
- Cependant, des cochons pourront recevoir des vaccins. Les installations de Saskatoon peuvent accueillir près de 1000 porcs.
- À l’aide de prélèvements, il sera possible pour les chercheurs de déterminer si les porcs ont développé une réponse immunitaire. Il faudra toutefois inoculer la maladie aux porcs pour réellement déterminer si le vaccin fonctionne. Si les résultats en laboratoire sont concluants, le centre VIDO-InterVac pourra demander au gouvernement canadien l’autorisation d’infecter des bêtes.
- "L’ACIA a aussi testé l’efficacité de vaccins dans son laboratoire de Winnipeg au cours de la dernière année, mais les résultats n’ont pas été concluants", a indiqué le Dr Komal.
« Le projet n’est pas terminé, ça continue. Je ne peux pas vous donner toute l’information avant que ce soit publié. Tout ce que je peux dire, c’est que oui, il y a des projets en marche. Par contre, en donnant la permission à ce centre-là de faire d’autres projets, ça nous donne une autre avenue », dit-il.
- Les travaux menés par les chercheurs fédéraux à Winnipeg ont toutefois conduit à la création d’une trousse pour permettre aux vétérinaires canadiens de dépister rapidement la maladie. Elle a d’ailleurs été testée au Viêtnam, l’an dernier, avec succès.
Un effort sans précédent
- L’attribution du permis d’importation du virus par Ottawa s’inscrit dans une série de mesures sans précédent pour protéger l’industrie porcine de ce fléau.
- La principale crainte des autorités est que des voyageurs introduisent ici des produits du porc transformés comme des saucissons ou des produits séchés ou saumurés qu’ils rapportent de l’étranger.
- Chine, Russie, Europe de l’Est : avec l’augmentation du nombre de pays touchés par la maladie, Ottawa a décidé d’augmenter le nombre d’équipes de maîtres-chiens spécialisés dans la détection de produits alimentaires. Au cours des cinq prochaines années, 18 nouvelles équipes de chiens renifleurs seront formées par l’Agence des services frontaliers.
- Désormais, les voyageurs qui importent de la viande de porc s’exposent à des amendes pouvant aller jusqu’à 1300 $.
Daphné Cameron
Publié par : lapresse.ca
Samedi 28 Décembre 2019
Allemagne du Nord - Mer Baltique - Riems
Rage, peste porcine, Ebola…
Plongée au cœur de l'« Alcatraz des virus » en Allemagne
Le Friedrich Loeffler Institut (FLI), sur l’île de Riems, dans le nord de l’Allemagne. | AFP/LARISSA RAUSCH
Source : ouest-france.fr Surnommée l’île la plus dangereuse d’Allemagne, Riems, dans la mer Baltique, abrite depuis plus d’un siècle un institut de recherche sur les virus animaux potentiellement mortels pour les humains.
Riems est un petit bout de terre au sud de la très touristique île de Rügen, en Allemagne. Des scientifiques y étudient des agents pathogènes tels que la rage, la peste porcine africaine, le virus de Crimée-Congo ou Ebola, en testant leurs effets sur des grands animaux comme des porcs ou des vaches, avec l’espoir de développer un vaccin.
"Nous sommes vraiment un Alcatraz des virus, enfin une sorte de prison pour les virus", explique le vice-président de l’institut Friedrich-Loeffler pour les épidémiologies (FLI), Franz Conraths, un institut de recherche sur les virus animaux potentiellement mortels pour les humains.
Le Dr Helge Kampen montre un moustique au microscope à l’institut Friedrich-Loeffler. | AFP / JOHN MACDOUGALL-Source : ouest-france.fr Des accès très réglementés
L’accès à l’île est réglementé, une autorisation préalable est indispensable et les contrôles de sécurité nombreux. Les laboratoires renfermant les virus dangereux et les étables sont placés au niveau de sécurité 4, le plus élevé. Les scientifiques qui y travaillent passent par des douches de désinfection à l’entrée et à la sortie, et doivent enfiler une combinaison spéciale de protection.
"Nous faisons tout notre possible pour garantir que [les virus] ne sortent pas en dehors" de l’île, "c’est très important pour notre travail", précise le chercheur.
Le bâtiment principal de l’institut Friedrich-Loeffler. | AFP / JOHN MACDOUGALL
Source : ouest-france.fr
Le plus ancien institut du monde
- Aucune installation de ce style n’existe ailleurs en Europe. Il faut aller à Winnipeg au Canada ou à Geelong en Australie pour trouver des équipements similaires. Il s’agit aussi du plus ancien centre de recherche en virologie du monde, créé en 1910 par un pionnier dans ce domaine, l’Allemand Friedrich Loeffler.
- Autrefois concentré dans un bâtiment, l’institut occupe aujourd’hui la quasi-totalité de la petite île de près de 1,3 km de long, reliée à la terre ferme au début des années 1970 par une digue.
- Sous le régime nazi (1933-1945), des recherches sur des armes biologiques ont été menées, avant que le centre ne se concentre sur la mise au point de vaccins du temps de l’Allemagne de l’Est communiste (1949-1990). À l’époque, environ 800 personnes y travaillaient.
Un chercheur dans un laboratoire de l’institut Friedrich-Loeffler. | AFP / JOHN MACDOUGALL Source : ouest-france.fr
Éviter les épizooties
- L’État a investi quelque 300 millions d’euros à partir de 2008 pour moderniser l’infrastructure, qui compte aujourd’hui 89 laboratoires avec différents niveaux de sécurité et 163 étables.
- "Le plus gros du travail que nous effectuons est un travail dans le domaine de la préparation au déclenchement d’une épizootie", explique Franz Conraths, citant en exemple la peste porcine africaine. "Nous devons chaque jour nous attendre à ce qu’elle se déclenche en Allemagne, mais nous devons tout faire pour éviter qu’elle arrive", explique-t-il.
10 000 animaux sur l’île
Il y a plus de 10 000 animaux sur l’île, des moustiques aux souris en passant par les poissons. Et dans les étables de quarantaine, il y a surtout 80 à 100 grands animaux : vaches, moutons, chèvres, alpagas ou sangliers.
"Nous faisons tout notre possible pour mener nos analyses sans avoir à faire des tests sur les animaux", explique Martin Beer, qui dirige l’institut de diagnostics sur l’île. Mais "la pathogenèse, à savoir pourquoi l’animal est malade, comment se développe la maladie, comment réagit-il, je ne peux la mesurer qu’en inculquant l’infection à un animal", dit-il.
L’institut Friedrich-Loeffler abrite 10 000 animaux | AFP / JOHN MACDOUGALL - Source : ouest-france.fr Les animaux trop malades sont euthanasiés, pas question de les laisser souffrir jusqu’au bout. Si de tels essais permettent d’élaborer un vaccin qui sauvera à des millions d’animaux, alors "les essais sont justifiés", estime-t-il.
Larissa RAUSCH
Publié par : ouest-france.fr
Jeudi 12 Décembre 2019
Peste porcine africaine
Les autorités allemandes sur le qui-vive La découverte récente d’un sanglier porteur de la peste porcine africaine à seulement quarante kilomètres de la frontière a mis les autorités allemandes en alerte. © Alain Cardinaux/GFA/Source : lafranceagricole.fr Un sanglier porteur de la peste porcine africaine a été repéré à une quarantaine de kilomètres à l’est de la frontière allemande. Cette découverte inquiète les autorités qui mettent tout en œuvre pour éviter la contamination de leur cheptel porcin.
Chiens renifleurs, drones ou clôtures électriques : l’Allemagne essaie par tous les moyens d’empêcher des sangliers venant de pays limitrophes de transmettre la peste porcine, synonyme de désastre économique dans un pays où le cochon est roi.
- Les autorités allemandes s’inquiètent de l’avancée rapide de cette maladie virale très contagieuse chez les suidés. Après des cas découverts en Belgique l’an dernier mais rapidement maîtrisés, les regards se tournent désormais vers l’est. L’apparition d’un foyer à la mi-novembre dans l’Ouest polonais avait déjà inquiété la filière. Mais la découverte au début de décembre d’un sanglier porteur de la peste porcine africaine (PPA) à Nowogrod Bobrzanski, à seulement quarante kilomètres de la frontière, a mis les autorités allemandes en alerte.
Déploiement de moyens importants
- « La question n’est plus de savoir si la PPA atteindra l’Allemagne, mais quand ! Le virus survit dans la boue des passages de roue jusqu’à 100 jours », s’émeut Torsten Reinwald, porte-parole de la Fédération allemande de chasse, interrogé par l’AFP.
- C’est donc le branle-bas de combat dans plusieurs régions allemandes, où sont testées différentes méthodes pour le traquer. Une unité spéciale de six chiens renifleurs formés à dénicher les sangliers décédés a été mise en place dans la Sarre, voisine de la France. Son but : retrouver rapidement d’éventuelles carcasses d’animaux qui étaient malades. En Saxe, limitrophe de la Pologne, chasseurs, vétérinaires et secouristes se forment lors d’exercices pratiques. Armés de drones ou de caméras infrarouges, ils simulent l’apparition d’un cas infectieux et sa gestion.
- Plus au nord, le Mecklembourg-Poméranie-Occidentale a acheté pour 50 000 euros une clôture électrifiée mobile de 50 kilomètres, dans l’espoir de limiter les passages de phacochères parvenant de la Pologne.
- Une éventualité devenue réalité au Danemark : très prévoyant, le royaume scandinave vient de terminer la construction d’une barrière de 70 kilomètres sur sa frontière avec l’Allemagne, censée bloquer toute arrivée de sangliers.
Le sanglier comme premier vecteur
- Depuis 2014, le virus s’est d’abord propagé dans les pays de l’Est (Lettonie, Lituanie, Pologne, Serbie, Ukraine, Moldavie, Slovaquie, Roumanie), y faisant des ravages dans les populations porcines. « La possibilité d’une infection venant de sangliers malades traversant la frontière est très élevée, davantage aujourd’hui que par inadvertance humaine », admet Sandra Blome, responsable des laboratoires nationaux pour la peste porcine à l’Institut Friedrich-Loeffler.
- Cette dernière piste était pourtant jusqu’à présent privilégiée : un sandwich au jambon contaminé par la PPA, qui peut survivre plusieurs mois dans des produits fumés, jeté par terre et mangé par un sanglier. « Depuis son apparition en Europe en 1957, le virus a presque toujours été importé dans d’autres pays par des aéroports ou des ports. Il a pu être exterminé partout, sauf en Sardaigne », rappelle Mme Blome. Des affiches informatives du ministère de l’Agriculture invitant les voyageurs à ne pas laisser traîner leurs restes de repas fleurissent ainsi dans les trains et aires de repos.
- Bien qu’inoffensive pour les humains, cette maladie virale très contagieuse entraîne des hémorragies qui peuvent être fatales en quelques jours chez les sangliers et porcs domestiques. Aucun vaccin n’a encore fait ses preuves.
Des pertes économiques importantes
- L’abattage du bétail contaminé constitue le seul moyen de prévenir la propagation de l’épizootie, un cauchemar pour les éleveurs allemands. Produisant près de 5 millions de tonnes de cette viande chaque année, dont la moitié destinée au marché étranger, l’Allemagne est le premier exportateur européen de porcs.
- Mais au premier cas décelé de PPA, l’exportation hors UE de toute la production nationale devient impossible. « La probabilité que des pays comme la Chine imposent une interdiction totale d’importation est très élevée. Ils l’ont déjà fait en Belgique », s’inquiète Sarah Dhem, représentante de l’industrie allemande de la viande. Et les pertes économiques pourraient se compter en milliards d’euros, avec un marché européen submergé de porcs certes sains mais aux prix cassés.