Vendredi 26 juillet 2024
Piscines sauvages et barrages des galets : attention c’est interdit
Depuis plusieurs années le monde de la pêche et de l’eau alerte sur les graves impacts de ces piscine sauvages et barrages de galets.
Les piscines sauvages : une fausse bonne idée répréhensible
- Chaque été les mêmes messages d’alerte ressurgissent un peu partout en France. « stop aux barrages en galets ». Car durant la période estivale, certains baigneurs construisent des petits barrages en galets. En travers des rivières afin d’augmenter le niveau d’eau sur une petite surface. Améliorant ainsi le confort de baignade. Ces barrages sont certes éphémères et disparaissent normalement lors d’une crue. Mais avant qu’ils soient détruits naturellement ils ont des impacts significatifs sur les cours d’eau et les espèces qui y vivent.
- Construire un barrage de pierres pour se créer un bassin de baignade permet certes de passer un moment agréable en famille. Mais l’écoulement de l’eau qui se fait moins rapide accentue le réchauffement du milieu. Affaiblit les potentiels de vie dans ces quelques mètres cubes.
- La Fédération de Pêche des Pyrénées Orientales le rappelle chaque année. « Dans ces retenues, l'eau a tendance à stagner et la température augmente rapidement, pouvant ainsi engendrer la mort des poissons emprisonnés (quelques degrés supplémentaires suffisent pour faire mourir un poisson). A cela, nous pouvons ajouter les dérangements causés auprès des espèces d'invertébrés aquatiques qui vivent sous les cailloux. ».
- Et que penser des crèmes solaires. Efficaces contre les UV, ses composées sont une catastrophe pour les milieux aquatiques.
Des pratiques répréhensibles
- Fabriquer de petits barrages, même à la main, doit faire l’objet selon la Loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques d’une déclaration associée à une note d’incidence sur les milieux aquatiques ou d’une demande d’autorisation associée à une étude d’impact auprès des services compétents en matière de Police de l’Eau. Cette démarche est proportionnée à l’ampleur de l’aménagement selon la nomenclature associée à cette loi.
Par Isabelle Leca
Pour lechasseurfrancais.com
Des médicaments vétérinaires toxiques pour les rapaces et charognards
Les médicaments vétérinaires restant dans les cadavres des animaux peuvent être particulièrement toxiques pour les rapaces.
- En mangeant des cadavres d’animaux non pris en charge par le service d’équarrissage et donc laissés dans la nature, les rapaces et autres animaux nécrophages peuvent accidentellement être exposés à des médicaments vétérinaires.
Rapaces et charognards particulièrement exposés aux médicaments vétérinaires
- Certains anti-inflammatoires et barbituriques sont particulièrement à risque. L’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) appelle les vétérinaires et les éleveurs à prendre toutes les précautions requises. Lorsque ces médicaments sont administrés à des animaux susceptibles d’être consommés par des animaux nécrophages après leur mort.
- Les oiseaux de proie et les charognards peuvent être exposés aux médicaments vétérinaires. Tout particulièrement lorsque des cadavres d’animaux traités ( souvent des ruminants ou des équidés) sont :
- déposés dans des aires de nourrissage pour oiseaux nécrophages ;
- laissés dans les champs parce que l’équarrissage n’est pas possible. Ou quand la découverte du cadavre est tardive.
- Cela peut être le cas pour certains types d’élevages pratiqués sur de très grandes surfaces de pâturages, ou en zone de montagne lorsque les parcelles sont difficilement accessibles.
Des décès enregistrés sur des vautours en Italie
- Plusieurs décès de vautours ont été enregistrés en Italie suite à l’ingestion de viande contaminée avec de la flunixine. Un anti-inflammatoire présent dans plusieurs médicaments vétérinaires autorisés partout en Europe. Des publications scientifiques ont également confirmé la toxicité de ce principe actif pour les vautours sauvages.
- Dans ce contexte, l’Agence européenne des médicaments a conclu à la nécessité d’ajouter des précautions d’emploi aux notices des médicaments concernés. Elle demande aussi aux vétérinaires d’éviter de prescrire ces médicaments. Uniquement dans le cas où l’animal traité présente un fort risque de mortalité avant la fin du délai d’élimination du médicament. Et que le ramassage du cadavre par l’équarrissage n’est pas envisageable.
- Des cas d’intoxication d’oiseaux sauvages ont été attribués à la consommation probable de carcasses d’animaux euthanasiés avec du pentobarbital.
Les animaux domestiques également concernés
- Les oiseaux sauvages ne sont pas les seuls concernés par ces intoxications accidentelles. Plusieurs cas d’intoxications secondaires ont également été rapportés chez des chiens de ferme.
- Après avoir ingéré des morceaux de carcasses ou du sang issu d’animaux euthanasiés. Ces derniers ont présenté des symptômes neurologiques pouvant aller jusqu’au coma et au décès.
Source : ANSES
Par Isabelle Leca
Pour lechasseurfrancais.com
Le Loup : espèce protégée à géométrie variable ?
A l’automne 2023, la présidente de la Commission européenne, Madame Ursula von der Leyen a esquissé une éventuelle révision du statut d’espèce protégé du loup en soulignant que celui-ci pouvait être un danger pour l’homme. Plus globalement, l’augmentation continue des populations implique nécessairement à se questionner sur le statut de cette espèce, pas tout à fait comme les autres, dans un environnement largement anthropisé.
- Selon le Ministère de la Transition Ecologique, la population du loup (canis lupus) était estimée de 920 loups, réévaluée à 1096 en sortie d’hiver 2021-2022, contre 624 (réévaluée à 783) l’hiver précédent. L’effectif estimé à la sortie de l’hiver 2022-2023 serait de 1104 individus.
- En cinq ans, la population lupine aurait doublé (430 loups en 2018) et l’expansion géographique se poursuivrait très régulièrement avec un nombre de zones de présence du loup qui croît fortement : on comptait 157 zones de présence permanente en 2022 contre 125 en 2021 ; parmi ces zones, 135 correspondaient à des meutes en 2022 contre 106 en 2021 ; pour rappel, on comptait 52 meutes en 2017.
- Entre 2018 et 2021, le niveau de la déprédation sur les troupeaux s’était stabilisé et avait amorcé une légère baisse tout en restant important (10 826 animaux domestiques indemnisés ou en cours d’indemnisation en 2021 pour 11 746 en 2020 et 11 849 en 2019). Néanmoins, en 2022, ce niveau a connu à nouveau une forte augmentation : +21 % pour les attaques avec 4277 constats de dommages contre 3516 en 2021, et +24 % pour les victimes avec 13 286 animaux indemnisés.
Or, il doit être rappelé que le loup (canis lupus) est une espèce strictement protégée au niveau international et européen
- Cette espèce est inscrite à l’annexe II de la Convention de Berne en date du 19 septembre 1979 et aux annexes II et IV de la Directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 dite « Habitats, Faune, Flore », où il est classé « prioritaire d’intérêt communautaire ». Depuis le 11 juin 2020, la CJUE a d’ailleurs considéré que le loup est protégé en Europe, où qu’il se trouve, c’est-à-dire même en dehors de son habitat naturel et se retrouve dans des zones de peuplement humain (CJUE 11 juin 2020, Alianta pentru combaterea abuzurilor, no C-88/19). Il est également protégé au niveau mondial, par la convention dite CITES du 1er juillet 1975 a son annexe I et II.
- Au niveau national, il s’agit d’une espèce protégée au sens de l’article L.411-1 du code de l’environnement et classée comme telle par l’arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection. La protection de cette espèce date de l’arrêté ministériel du 22 juillet 1993. Toutefois, cette protection peut être considérée comme relative, puisque les tirs d’animaux demeurent autorisés dans un cadre défini par le pouvoir règlementaire et parfois toléré dans un état de nécessité :
- D’une part, et par exception, l’article L. 411-2 du code de l’environnement permet de déroger au principe d’interdiction d’atteinte si trois conditions cumulatives sont réunies, à savoir :
- L’absence de solution alternative satisfaisante ;
- L’absence de nuisance dans un état de conservation favorable de l’espèce ;
- L’existence d’une motivation spéciale énumérée par le texte dont la démonstration d’une raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM).
- Par ailleurs, l’article 44, 2 de la loi no 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt autorise le prélèvement de loups dans des zones de protection renforcée, délimitée, par arrêté préfectoral, pour une durée maximale d’un an lorsque des dommages importants causant une perturbation de grande ampleur aux élevages sont constatés, en dépit des mesures de protection susceptibles d’assurer un équilibre entre les intérêts économiques et sociaux et la protection de l’environnement. Un plafond de destruction spécifique est déterminé pour chacune des zones de protection renforcée, dans le respect d’un plafond national. Pour autant, la mise en place de ces zones de protection renforcée contre le loup ne doit nuire au maintien dans un état de conservation favorable de cette espèce sur le territoire national.
- Le cadre actuel d’intervention sur la population de loup est précisé par l’arrêté cadre du 23 octobre 2020 fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup. Il définit les types de tirs autorisés pour la lutte contre la prédation touchant les troupeaux bénéficiant de mesures de protection, en privilégiant les tirs de défense. Il prévoit de fixer chaque année civile un seuil maximum de loups pouvant être détruits tout en garantissant le maintien de la population de l’espèce dans un état de conservation favorable.
- Cet arrêté cadre est complété par un arrêté plafond, également daté du 23 octobre 2020, dans lequel est fixé le pourcentage maximum de loups pouvant être détruits par rapport à la population estimée en se fondant sur la méthode du suivi hivernal de la population de loup fournies par l’Office français de la biodiversité (OFB). Ce seuil étant fixé à 19 % de l’effectif moyen de loups estimé annuellement. On est donc pas très éloigné seuils applicables aux populations de grands gibiers soumis au plan de chasse. Il revient ensuite au préfet coordonnateur du plan national d’actions « Loup et activités d’élevage » de publier chaque année le nombre de loups traduisant ce pourcentage.
- Des plans nationaux d’action sur le loup sont adoptés dans un cadre pluriannuel. Dans la suite du nouveau Plan National d’Actions 2024-2029 sur le loup et les activités d’élevage, qui se substitue à celui 2024-2029, deux arrêtés le mettant en application sont parus :
- L’arrêté du 21 février 2024 fixe (en les assouplissant) les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup: A ce titre, il est notamment prévu la suppression de l’obligation, pour les lieutenants de louveterie et les agents de l’OFB, d’éclairer la cible pour un tir de nuit et la suppression de la limitation de l’usage des dispositifs de type « caméra thermique » aux seuls lieutenants de louveterie, agents de l’Office français de la biodiversité, et chasseurs opérant en leur présence et permet de passer à deux tireurs, voire trois (selon les circonstances locales), pour les tirs de défense simple..
- L’arrêté du 22 février 2024 revalorise l’indemnisation des dommages causés aux troupeaux domestiques par le loup, l’ours et le lynx à hauteur de +33 % pour les ovins et de +25 % pour les caprins.
- L’instruction technique aux préfets du 23 février 2024 accélère les procédures de délivrance des autorisations de tir (maximum 48h après attaque) ainsi que le déploiement des louvetiers (sous 48h si une autorisation est déjà accordée, 72h si une nouvelle autorisation est nécessaire). Elle demande également aux préfets de spécialiser des louvetiers sur les tirs de loups. Considérant la non-protégeabilité des troupeaux bovins, équins et asins, les préfets délivreront désormais, dès la première attaque, des autorisations de tirs de défense aux éleveurs victimes d’attaques lupines.
- En conséquence, si les prélèvements de loup sont officiellement dérogatoires et limités, d’aucuns ont pu considérer qu’il s’agissait d’une chasse spécifique, très encadrée mais s’ouvrant au fur et à mesure que le régime de protection permet l’augmentation des effectifs.
- D’autre part, il est précisé que la méconnaissance du principe d’interdiction d’atteinte à une espèce protégée au titre de l’article L.411-1 du code de l’environnement est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 36 mois assortie d’une amende pouvant atteindre 150 000 euros en application de l’article L415-3 du code de l’environnement.
- Toutefois, cette infraction n’apparait pas constituée lorsque le tireur se trouve dans un état de nécessité. En effet, et en application de l’article 122-7 du code pénal, n’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace. Il y a état de nécessité quand la commission de l’infraction est le seul moyen d’éviter un dommage plus grave que celui qui risque d’être causé par cette infraction.
- Il ne faut pas confondre l’état de nécessité avec la légitime défense. Ils se ressemblent en ce que, dans les deux cas, il s’agit d’éviter un mal plus grand que celui que l’on cause. Mais ils diffèrent en ce que l’état de nécessité consiste à se défendre, non contre l’agression d’une autre personne, mais contre un mal provenant de circonstances extérieures.
- Ce faisant, l’état de nécessité pour le tir du loup ne semble pas correspondre à la défense d’un troupeau qui est directement par les arrêtés ministériels précitées. A ce titre, le Juge administratif a pu considérer que « les dispositions de l’article L. 411-2 du Code de l’environnement ne subordonnent pas les tirs de défense à l’existence d’une attaque préalable directe contre chacun des troupeaux susceptibles de faire l’objet de ces tirs » (exemples CE, 18 décembre 2017, n°393101 ; CE, 21 avril 2022, n° 448136). Il suffit pour ce faire que le troupeau concerné se situe sur une commune sur laquelle au moins trois attaques ont été constatées au cours des douze mois précédant la demande de dérogation. Le Juge administratif accepte la dimension préventive de ces tirs de défenses, lorsqu’ils s’inscrivent dans un risque suffisant d’attaque.
- Il a pu être considéré que l’état de nécessité était justifié s’agissant d’une personne qui abat un chien menaçant son propre chien, la chambre criminelle considérant son comportement comme justifié par l’état de nécessité (Cass. crim., 8 mars 2011, n° 10-82.078).
Toutefois, cet état de nécessité s’apprécie de manière restrictive.
- Ainsi, il a pu être jugé que le fait que plusieurs ou même l’ensemble des bergers des Alpes-Maritimes estiment que la présence du loup constitue un obstacle à l’exercice normal de leur activité ne saurait être constitutif de l’intérêt supérieur définissant l’état de nécessité qui se définit comme la situation dans laquelle se trouve une personne qui, pour sauvegarder un intérêt supérieur, n’a d’autre ressource que d’accomplir un acte défendu par la loi pénale, cet intérêt s’appréciant de façon objective et devant être le même pour tous. Le prévenu ou un groupe de personnes unies par la profession ne peuvent s’ériger en juge de la valeur des intérêts à défendre ou de caractère certain du péril (T. corr. Nice, 24 novembre 2003, Pogunkte, n°3876/03).
- S’agissant de l’ourse Canelle, il a pu être considéré en cassation que la connaissance que le tireur avait de la présence de l’ourse dans le périmètre de chasse ou à proximité immédiate et son attitude après sa première confrontation avec l’ourse et alors qu’il savait qu’il allait être secouru doivent bien évidemment être analysées comme un comportement fautif aggravé par le fait que l’intéressé était un chasseur pyrénéen expérimenté connaissant parfaitement les problèmes de l’ours et la protection de cet animal. En conséquence, son comportement fautif antérieurement au tir ne lui permettait pas d’invoquer le fait justificatif de l’état de nécessité au sens de l’article 122-7 du code pénale (Crim. 1er juin 2010, n°09-87.159).
- Récemment en 2024, un chasseur du Var a vu ses poursuites abandonnées par le parquet de Draguignan après avoir tiré sur un loup dont il prétendait qu’il allait l’attaquer. En effet, le parquet a considéré son récit comme crédible aux vues des constatations des enquêteurs.
En conclusion, il apparait évident que le statut du loup sera amené à évoluer dans les prochaines années. Dans l’histoire humaine, le loup a toujours été un concurrent pour l’Homme. Pour autant, nous ne pouvons pas nous résoudre à considérer que le loup n’aurait pas sa place dans notre environnement. Sa présence de plus en plus visible en France conduira nécessairement à s’interroger sur un partage équitable de l’espace avec des territoires colonisés à faible présence humaine où le loup sera maintenu et régulé et d’autres plus fortement urbanisés où sa présence sera indésirable et où il devra être systématiquement supprimé.
Par Aymard de la Ferté-Sénectère
Avocat au Barreau de Paris
Pour chassons.com