- Leur réaction ne s'est pas fait attendre. Alors que le juge des référés du Conseil d'État a suspendu les autorisations autour des chasses traditionnelles aux oiseaux lundi en début de semaine, le candidat écologiste à la présidentielle Yannick Jadot a proposé d'aller encore plus loin, ce vendredi : l'écologiste a réclamé, sur notre antenne, l'interdiction de la pratique de la chasse les week-ends et durant les vacances scolaires.
- Sa proposition succède à l'accident qui a vu un jeune homme de 29 ans recevoir une balle perdue en plein thorax à Vallières-sur-Fier en Haute-Savoie jeudi - si la blessure est grave, son pronostic vital n'est cependant pas engagé. Un incident qui s'inscrit au milieu d'un bilan : l'an passé, d'après les chiffres de l'Office français de la biodiversité, on a recensé 141 victimes de la chasse et déploré onze morts. Mais les chasseurs en sont certains : la cohabitation est possible avec les ruraux et les promeneurs et l'idée d'interdiction de leur activité les week-ends les ulcèrent.
- "C’est inconcevable qu’un tel accident puisse se produire aujourd’hui. Je le condamne fermement." La parole ne vient pas ni d'un élu local ni d'un militant anti-chasse, mais d'André Mugnier, président de la Fédération des chasseurs de la Haute-Savoie, commentant le drame survenu jeudi. Il a argué "des efforts que nous faisons, en Haute-Savoie notamment, parce que nous avons été les premiers à mettre en place une formation en sécurité".
Pour autant, pas question pour les chasseurs d'en tirer un enseignement plus définitif, et encore moins de se rallier à l'idée de leurs adversaires traditionnels : les écologistes. Willy Schraen, président de la Fédération nationale des chasseurs, s'en est pris à l'eurodéputé sur notre antenne :
- L'écologiste aurait-il fourré son nez dans les affaires (et sur le territoire) des autres?? Pour Pierre Rigaux, naturaliste, militant anti-chasse et auteur de Pas de fusil dans la nature, cette manière de poser le débat n'est pas valable. Il l'a dit ce samedi à BFMTV :
- Quand on lui parle "cohabitation", le naturaliste et militant rétorque : "Pour mieux cohabiter, il faut que les chasseurs lâchent un peu de lest, et qu’ils acceptent que certains jours, deux ou trois par semaines, on ne puisse plus chasser, que ce soit admis au plan national". Et pour lui, c'est une question de sécurité autant que de lisibilité : "Qu’on n’ait pas besoin de se renseigner de manière compliquée en préfecture."
- Thierry Coste est une figure incontournable du monde de la chasse. Le lobbyiste est le conseiller politique de la Fédération nationale des chasseurs. Selon lui, ça ne fait pas un pli. "C’est tout à fait possible de chasser et de se promener en même temps! Il faut arrêter?! On a fait énormément d’efforts et on continue. Et si la personne qui a tiré n’a pas respecté les règles, on se portera partie civile. C’est une évidence", a-t-il tempêté auprès de France Inter, dans un sujet diffusé ce samedi matin. Il a encore durci le ton à l'égard de Yannick Jadot, pointant une démarche "électoraliste", n'hésitant pas à estimer que le prétendant à l'Élysée se "radicalis(ait) pour la campagne".
- Toujours au micro de la radio publique, Brigitte Soulary, présidente de la Fédération française de randonnée pédestre, a tenté de concilier ou du moins de rapprocher ces positions antagonistes avec une proposition médiane :
- Les Alsaciens de la vallée de Munster seront d'ailleurs confrontés à un cas pratique ce samedi. 250 chasseurs vont s'y disséminer pour une battue aux sangliers. "Nous avons gentiment demandé à tous les randonneurs d’éviter toute cette zone où nous chassons pour ne pas les exposer à des risques inutiles", a fait valoir Raymond Blaise, président du groupement d’intérêt cynégétique, devant notre caméra à l'occasion de cet événement. Une zone vaste de 13.000 hectares.
Samedi le président de la fédération nationale des chasseurs était présent à Amiens auprès de 10 000 chasseurs afin de montrer son soutient au chasses traditionnelles mais également envoyer le signal que les chasseurs sont au bord de l’explosion.
- Le vase déborde commente Willy Schraen, aujourd’hui les chasses traditionnelles, demain le gibier d’eau, après demain la palombe si on ne fait rien.
- Devant une foule acquise à sa cause le président Schraen a fait savoir que les chasseurs mais également la « ruralité » dit stop à l’intégrisme vert.
- Ironie du sort c’était à Amiens en 2016 que Willy Schraen tout juste élue à la tête de la FNC avait eu sa première prise de bec avec ce qui deviendra la futur ministre de l’écologie : Barbara Pompili
Le ministère de l’écologie ne s’est pas toujours appelé ainsi, c’est un ministère qui a beaucoup évolué sous la 5e République puisqu’il s’appelait encore « ministère de l’équipement » en 1966 pour devenir aujourd’hui le ministère de la Transition écologique (notons que la composante « et solidaire » a disparu de l’appellation du ministère en 2020).
- Malgré les nombreuses mutations qu’à connu cette composante du gouvernement, elle ne cesse depuis les années 70 de diviser les Français, opposant les différentes parties de la société et essayant d’imposer ses idées contre l’avis de la population concernée.
- Les agriculteurs et les chasseurs ont été les premiers à se rebeller contre des manœuvres nauséabondes qui visent toujours les acteurs de la ruralité. Déjà en 1989, les premières manifestations pour la défense de la chasse du gibier d’eau voyaient le jour. En 1998, c’est à Paris que les chasseurs se déplaçaient pour demander la démission de la ministre écologiste de l’époque : Dominique Voynet.
- En 1999 cette même ministre a poussé à bout les agriculteurs qui ne se sont pas laissés faire et ont investi ses bureaux alors qu’elle voulait instaurer une écotaxe. Une première attaque de l’écologie punitive qui aurait laissé des exploitants dans la misère alors qu’ils subissaient déjà une réforme de la Politique Agricole Commune.
- Depuis cette période, le ministère de l’environnement, de l’écologie ou peu importe le nom que les différents gouvernements lui donnent n’a de cesse de vouloir expliquer aux gens de la campagne comment ces derniers doivent vivre. C’est quelque chose qui ne passe plus à voir le public présent lors des dernières manifestations des 17 et 18 septembre derniers.
- Dans les cortèges il y avait des chasseurs et des agriculteurs mais pas seulement. Il y avait aussi les pêcheurs qui nous ont enfin rejoint, des bouchers qui en ont assez de se faire briser leurs vitrines, les gens du cirque qui sont harcelés, des élus et de simples habitants de la campagne. Tous ces gens qui en ont assez de s’entendre dicter la conduite qu’ils doivent adopter par des gens qui vivent au 8e étage d’une tour parisienne.
- C’est justement avant la manifestation qui s’est déroulée à Amiens ce 18 septembre que Willy Schraen, Président de la Fédération Nationale des Chasseurs, a soumis l’idée que la création d’un ministère de la ruralité était bien plus pertinente que l’appareil existant. Ce ministère pourrait inclure toutes les parties qui ont besoin de travailler ensemble : les agriculteurs, les associations, les chasseurs, les pêcheurs, les professions qui gravitent dans le milieu rural et autour de l’élevage, etc.
- Ce ministère de la ruralité pourrait prendre en compte les différents avis, il pourrait aider les professions qui en ont besoin au lieu de les briser, il pourrait faire revenir les services publics en campagne sans bétonner à outrance et il pourrait arbitrer les situations complexes sans léser aucun des acteurs. L’existence d’un tel ministère pourrait assurément, sur le papier, instaurer un climat plus serein entre les urbains, les néo-ruraux et les ruraux.
- Le Président de la FNC est revenu sur cet engouement pour la chasse et sur cette augmentation d’inscriptions à l’examen du permis de chasse qui fait beaucoup de bien.
- En outre, Willy Schraen a semble-t-il déjà trouvé les mots et sa place de chroniqueur avec des métaphores dont il a le secret. En effet, ce dernier a comparé l’expression des vegans à des cockers dépressifs afin de décrire la joie de vivre des mangeurs de carottes ! Difficile de ne pas sourire?!
- À noter par ailleurs, que certainement d’un commun accord avec RMC, Willy Schraen n’est plus présenté comme le Président de la Fédération Nationale des Chasseurs, mais un « Chasseur, rural et conseillé municipal ». Ceci sans doute afin d’éviter toute confusion et ambiguïté avec sa fonction au sein de la FNC
- Lorsque Ombline Roche l’interroge sur les raisons de ce rebond, le chasseur y voit un nouvel intérêt pour les valeurs véhiculées par la chasse. « C’est une réelle possibilité d’être dans la nature ». Après une crise sanitaire qui n’a laissé personne de marbre et plusieurs confinements qui ont coincé les gens chez eux, on sent un regain d’intérêt pour l’extérieur. Les activités outdoor connaissent un nouveau regain d’intérêt et la chasse en fait partie. Le profil type du chasseur en 2021 est par ailleurs tout à fait hétéroclite. « Ils ont des profils multiples, viennent d’horizons sociaux tout à fait différents ». Sans compter que de plus en plus de femmes passent derrière le fusil, suivies par les citadins.
- La chasse reste incontestablement une passion bien ancrée en France. Pourtant, d’après la journaliste, 55% des Français y seraient hostiles. Que faire pour changer la donne ? « La chasse a simplement besoin d’être expliquée », relève Willy Schraen. « Il y aura toujours des gens qui seront hostiles à la chasse, mais 70% des Français souhaitent en savoir plus sur le sujet ». Il faut aussi se débarrasser des idées reçues et autres clichés qui lui collent à la peau. En quelques décennies, la chasse a beaucoup évolué, tout en respectant ses traditions. Notamment en ce qui concerne la sécurité, souvent le premier argument des détracteurs.
- Les chasseurs, quant à eux, changent aussi d’image. Ce sont les premiers écologistes de France, malgré ce que certains sous-entendent. « On a des gens de plus en plus compétents, et de vrais amoureux de la nature », dévoile le président de la FNC. Cette passion les pousse en effet à passer du temps dans la forêt, dans les plaines, dans les montagnes, et à vouloir prendre soin de cette nature et de ses habitants. On ne compte plus les initiatives portées par des chasseurs pour prendre soin de l’environnement. « Chasse et nature sont indissociables ».
- Dans le viseur, 2022 et ses élections présidentielles dont on commence déjà à parler sérieusement. « La ruralité paraît vraiment être le monde des oubliés », regrette Willy Schraen. « Pour les questions d’écologie, il faut discuter avec toutes les composantes de la ruralité, en écoutant les gens qui vivent dans les territoires ». On commencerait ainsi à voir des décisions plus justes, en connaissance de cause. Les manifestations rurales à venir dans toute la France témoignent de ce manque d’écoute envers les campagnes.